La Régionale par SILUE ELIEL- Monsieur DIABY Louckman, Directeur d'Africajou.
Malgré les multiples problèmes auxquels vous êtes sans cesse confrontés, vous essayez tant bien que mal de mettre en place une industrialisation de cette filière…Pour rappel, il faut savoir que la Côte d'Ivoire, est le 2e producteur mondial et 1er exportateur mondial de noix de cajou avec 550. 000 tonnes estimées pour la campagne 2014, aujourd'hui on transforme selon les spécialistes moins de 10% mais je dirais entre 5 et 7%. Une énorme différence vu que la production augmente vite en moyenne par an, malheureusement l'industrialisation ne suit pas.
Les différents ateliers que le ministère de l'industrie a organisés avec celui de l'agriculture, il est prévu d'avoir 50% de la production locale transformée d'ici 2016 et 100% d'ici 2020. J'espère qu'on pourra le faire… Il y a déjà de grands groupes sur la place mais ce sont des groupes étrangers et ce n'est pas péjoratif que de le dire, à savoir Olam, Ups auxquels desquels, on trouve quelques ivoiriens qui essaient tant bien que mal de s’en sortir dont nous.
Mais comment faites- vous réellement, puisqu’il n’est tout de même pas donné avec vos maigres moyens d’affronter ces géants?Oui c'est difficile mais il faut dire que nous, nous exportons principalement vers les Etats-Unis. Je pense que nous avons encore une certaine marge de manœuvre vu les quantités transformées ici. Les grands groupes comme Olam, Kazaa ou groupe UPS, eux ont des marchés déjà acquis. Nous, nous avons de nouveaux marchés au niveau de la Russie, des pays du Golfe et de la Chine où il y a de nouveaux consommateurs. Il faut dire que bien que la noix de cajou est un produit de luxe et nous, nous arrivons quand même à la vendre.
Justement comment cette amande peut- elle être un produit de luxe alors que nous sommes le 2e pays producteur ?Simplement parce que la transformation ne se fait pas chez nous, elle se fait en Europe.
A quoi servent vos industries alors?A vendre en Europe, à faire entrer les devises, à donner de l'emploi à des ivoiriens.
Et qu’est-ce qui vous empêche de la transformer ici?Si on en transforme ici. Dans la noix de cajou, vous avez 3 niveaux de consommation. Le décorticage simple qui est la transformation de base. Après vous avez le calibrage et l'emballage d'amande blanche qui constitue 80 à 90% de la production des usines en Afrique. Dans le produit fini, il y a les amandes blanches et les amandes torréfiées, grillées et salées qu'on trouve dans les supermarchés.
Olam transforme juste un peu en grillé, mais 90% est vendu en amandes blanches en quantité de 23 kg en moyenne et ça se vend par container. Ce que nous vendons, ce n'est pas en 30 grammes comme dans les supermarchés. Quand le produit arrive aux Etats-Unis, ils font une dernière transformation, ils vont le saler au goût des européens et de leur marché puis les revendre en petite quantité de 20 à 30000 grammes dans leur supermarché, et c'est vendu relativement plus cher.C'est pour ça que je dis entre guillemets, que c'est un produit de luxe parce que quand ça nous revient d’Europe, c'est encore plus cher dans nos supermarchés.
Cette transformation coûte aussi cher que ça pour que vous n’en fassiez que de petites quantités ?On peut le faire, Olam en fait un peu, nous nous en faisons un peu. Il faut peut être expliquer aux gens que ce qui est rare, est cher. Nous pensons qu'avec le temps, quand nous arriverons à transformer disons 50% de notre produit localement, peut- être que les prix vont baisser dans les supermarchés si, c'est fait par des nationaux. Et puis, il y a quelque chose que les gens ne savent pas. Ils me disent « oui, mais nous achetons le kilo de noix à 250 FCA avec les paysans et puis nous vendons le kilo dans les supermarchés à 400 voire 500 ». Mais ce que les gens ignorent, ce n'est pas un kilo de noix qui donne un kilo d'amandes. C'est un rapport quasiment de un à cinq.
C'est à dire que pour faire un kilo d'amandes, il vous faut faire 5 kilos de noix brutes déjà. Donc si vous l'acheter à 250 FCFA, ça vous revient en réalité à 1000FCFA. Et après, il y a le coût de la transformation, la main- d’œuvre, l'électricité, les impôts et après vous vous retrouvez avec un produit qui, en définitive vous revient autour de 3000 FCFA. De plus, il faut bien que vous fassiez une marge pour que les gens puissent revendre. Quand on aura éliminé beaucoup de main- d'œuvre et que les machines vont faire des économies d'échelle, peut-être que ce qui se vend aujourd'hui à 4000 FCFA va se retrouver à 3000 CFA.
C'est tout de même aberrant de la faire partir à l'étranger et que ce soit l'étranger qui nous la ramène en produit fini pour nous l'imposer à des prix élevés dans nos supermarchés…Nous ne sommes pas obligés de l'envoyer là-bas. C'est simplement parce qu’il n’existe pas encore de marché local. Combien d'ivoirien consomment des arachides à plus forte raison des noix de cajou ?
Les arachides ou cacahuètes, ça, on en trouve tout de même à tous les coins de rues…Oui mais ils sont combien à en acheter en apéritif? En Europe pour avoir été souvent dans les supermarchés là-bas, les européens ne connaissent pas les fruits de saison, ils veulent pouvoir manger tout ce qu'ils veulent à n'importe quelle saison. Donc, ils n’hésitent pas à acheter tout ça en y mettant le prix. Nous, ici, c'est pas très cher parce qu'ici le kilo d'amande va se vendre autour de 4000 voire 5000 FCFA. En Europe, le kilo d'amandes grillées, c'est autour de 40 euros. C’est-à-dire 26.000 FCFA.
Mais ils sont vus comme des produits exotiques et ont donc tendance à coûter plus cher que les autres produits…Vous comprenez pourquoi nous préférons vendre en Europe ? Si nous pouvons faire plus de marge là-bas, pourquoi, me prendre la tête à chercher à satisfaire un marché local qui n’existe pas encore véritablement? En vendant par container, nous n'avons pas de frais de distribution, pas de commerciaux à rémunérer. On sait d’avance que les gens en ont besoin là-bas.
Quand vous dites que vous vous sentez bien, vous voulez parler spécifiquement de votre cas?On ne veut pas augmenter nos problèmes même si c'est un milieu extrêmement pourvoyeur d'emploi. L'Etat depuis l'année dernière a essayé de voir comment booster la transformation, mais pour cela, il va falloir accélérer les choses, si on ne veut pas que demain, ce ne soit que les grands groupes internationaux qui aient le monopole. Car dans mon réseau, nous avons près d'une dizaine d'usines en création en Côte d'Ivoire, dans lequel nous n’avons que des ivoiriens. Mais, il y a de grands groupes étrangers dont des indiens et autres qui arrivent.
Après, il faut savoir qu'avec une usine comme la nôtre par exemple, nous faisons 1500 -2000 tonnes par an, nous employons près de 200 personnes par an à côté de ça, les grands groupes, ce sont 2000 à 3000 personnes qu'ils emploient. Donc c'est quand même important si l'Etat arrivait à faire en sorte que les gens passent à la transformation. Mais, on ne le fera pas pour le moment parce qu’à l’heure actuelle, ça ne serait pas rentable.
Pour quelles raisons ?Car il faut étudier tous les coûts. On a essayé de fixer des prix qui arrangent plus ou moins les paysans mais il faut qu'on leur impose également des normes de qualité. De plus, l'Etat doit faire en sorte que nous nationaux, ayons un accès prioritaire, ce n’est pas méchant de le dire ou même de le penser, même s’il est vrai que nous sommes dans un pays de droit, il faudrait qu'on dise par exemple que les usines installées en Côte d'Ivoire, sont prioritaires. C’est-à-dire, ce n’est qu’à eux seulement qu'on doit vendre en premier pour que nous puissions nous approvisionner ensuite, viendront les étrangers.
Il faut aussi que les gens pensent à mettre une partie du dus qui est aujourd'hui collecté par l'exportation pour créer un fonds de garantie parce que nous n’aimons pas trop cette notion de banque, parce qu'après on ne sait pas qui donne quoi à qui. Pour le secteur de la transformation, même si on prend 1F et demi ou 2 FCFA sur les données actuellement, une fois que ce fonds est mis en place, un fonds auquel participera également l'Etat, tous les ivoiriens qui auront de bons projets bancables, si une banque dit « ok on accepte de vous financer », que ce fonds dise également « ok, nous partageons le risque avec vous».
Que faut-il faire alors ?Aujourd’hui, les banques ne vous prêteront de l’argent que si vous donnez la garantie en phase de remboursement. Une banque qui vous dira « ok, je veux financer votre projet à 80% ». Cela voudra dire, que nous, nous prenons les 60% de la garantie et le promoteur va trouver 10 ou 20%. Nous pensons que si ce fonds est exclusivement réservé aux ivoiriens, cela n'aura rien de chauvin parce que c'est notre argent. Avec ça, les gens pourront arriver à faire quelque chose parce qu'une usine de noix de cajou transformé ça coûte très cher. Une usine en moyenne, c’est autour de 3000 tonnes que ça commence à être une grande usine, il faut déjà mettre environ 1 milliard- 1 milliard 5 sur la table rien qu'en équipements, construction etc. Mais le plus dur reste à venir contrairement à ce que les gens pensent. Si vous mettez une usine de 3000 tonnes en place autour de 1 milliard, 1 milliard 5, la campagne étant saisonnière ça veut dire qu'il vous faut acheter un stock, parce que vous n'allez pas faire une usine qui ne va tourner que sur 3 ou 4 mois donc, il vous faut acheter 3000 tonnes de noix cajou.
Le calcul est très simple, vous faites 250 x 1000, ça vous fait 250 millions, donc 3000 ça vous fait de 750 à 800 millions de FCFA qu'il faut mobiliser voire un milliard. Donc vous voyez que c'est très difficile de faire tourner. Car si vous mettez 1 milliard pour construire chaque année, il vous faudra au bas mot 1milliard ou 1,2 milliards de fonds de roulement pour pouvoir tenir la campagne.
C’est énorme…Certes ce sont des sommes énormes mais il est temps, que tous, nous regardions dans la même direction, si l'Etat veut que d'ici 2016, 2017, nous soyons à 50 voire à 60% de transformation, ça passe inévitablement par ce genre de décisiions. Nous croyons que le nouveau code d'investissement est assez attractif surtout pour les régions du nord, avec la génération qu'il y a mais derrière il faut qu'on puisse aller plus loin notamment dans la recherche des terrains et la mise à disposition des terrains, d’espaces viabilisés parce que c'est un réel problème au nord. Les voies d'accès, le problème d'électrification pour les usines, tout ça complique encore un peu plus les choses. Nous, on en a fait un peu les frais à Bondoukou. Et, tous ces paramètres techniques sont du ressort de l'Etat non des individus que nous sommes.
La filière de l'acajou, une filière d'avenir ou en pointillés?Non, une filière nettement d'avenir. Parce que si on arrive aujourd'hui à transformer ne serait-ce que la moitié en Côte d'Ivoire soit 250 voire 3000 tonnes de noix de cajou, c'est autour de 300 000 tonnes à peu près de noix de cajou. Ne serait-ce qu'avec à ça ; nous allons créer 1 à 2 millions d'emploi pour les jeunes. Ce qui va résorber les problèmes de l'exode rural des jeunes du nord vers le sud, occasionner des entrées de devises, créer des infrastructures, des routes des écoles, des centres de santé et tout cela contribuera au développement de ces régions et apportera des devises à l'Etat. Nous pensons que c'est un bon challenge que l'Etat s'est fixé. Cependant, la date de 2016 nous paraît trop juste. Jusqu'en 2020, nous paraît plus raisonnable pour 50 voire 60% de transformation de notre production nationale.
Interview réalisée par SILUE ELIEL
Malgré les multiples problèmes auxquels vous êtes sans cesse confrontés, vous essayez tant bien que mal de mettre en place une industrialisation de cette filière…Pour rappel, il faut savoir que la Côte d'Ivoire, est le 2e producteur mondial et 1er exportateur mondial de noix de cajou avec 550. 000 tonnes estimées pour la campagne 2014, aujourd'hui on transforme selon les spécialistes moins de 10% mais je dirais entre 5 et 7%. Une énorme différence vu que la production augmente vite en moyenne par an, malheureusement l'industrialisation ne suit pas.
Les différents ateliers que le ministère de l'industrie a organisés avec celui de l'agriculture, il est prévu d'avoir 50% de la production locale transformée d'ici 2016 et 100% d'ici 2020. J'espère qu'on pourra le faire… Il y a déjà de grands groupes sur la place mais ce sont des groupes étrangers et ce n'est pas péjoratif que de le dire, à savoir Olam, Ups auxquels desquels, on trouve quelques ivoiriens qui essaient tant bien que mal de s’en sortir dont nous.
Mais comment faites- vous réellement, puisqu’il n’est tout de même pas donné avec vos maigres moyens d’affronter ces géants?Oui c'est difficile mais il faut dire que nous, nous exportons principalement vers les Etats-Unis. Je pense que nous avons encore une certaine marge de manœuvre vu les quantités transformées ici. Les grands groupes comme Olam, Kazaa ou groupe UPS, eux ont des marchés déjà acquis. Nous, nous avons de nouveaux marchés au niveau de la Russie, des pays du Golfe et de la Chine où il y a de nouveaux consommateurs. Il faut dire que bien que la noix de cajou est un produit de luxe et nous, nous arrivons quand même à la vendre.
Justement comment cette amande peut- elle être un produit de luxe alors que nous sommes le 2e pays producteur ?Simplement parce que la transformation ne se fait pas chez nous, elle se fait en Europe.
A quoi servent vos industries alors?A vendre en Europe, à faire entrer les devises, à donner de l'emploi à des ivoiriens.
Et qu’est-ce qui vous empêche de la transformer ici?Si on en transforme ici. Dans la noix de cajou, vous avez 3 niveaux de consommation. Le décorticage simple qui est la transformation de base. Après vous avez le calibrage et l'emballage d'amande blanche qui constitue 80 à 90% de la production des usines en Afrique. Dans le produit fini, il y a les amandes blanches et les amandes torréfiées, grillées et salées qu'on trouve dans les supermarchés.
Olam transforme juste un peu en grillé, mais 90% est vendu en amandes blanches en quantité de 23 kg en moyenne et ça se vend par container. Ce que nous vendons, ce n'est pas en 30 grammes comme dans les supermarchés. Quand le produit arrive aux Etats-Unis, ils font une dernière transformation, ils vont le saler au goût des européens et de leur marché puis les revendre en petite quantité de 20 à 30000 grammes dans leur supermarché, et c'est vendu relativement plus cher.C'est pour ça que je dis entre guillemets, que c'est un produit de luxe parce que quand ça nous revient d’Europe, c'est encore plus cher dans nos supermarchés.
Cette transformation coûte aussi cher que ça pour que vous n’en fassiez que de petites quantités ?On peut le faire, Olam en fait un peu, nous nous en faisons un peu. Il faut peut être expliquer aux gens que ce qui est rare, est cher. Nous pensons qu'avec le temps, quand nous arriverons à transformer disons 50% de notre produit localement, peut- être que les prix vont baisser dans les supermarchés si, c'est fait par des nationaux. Et puis, il y a quelque chose que les gens ne savent pas. Ils me disent « oui, mais nous achetons le kilo de noix à 250 FCA avec les paysans et puis nous vendons le kilo dans les supermarchés à 400 voire 500 ». Mais ce que les gens ignorent, ce n'est pas un kilo de noix qui donne un kilo d'amandes. C'est un rapport quasiment de un à cinq.
C'est à dire que pour faire un kilo d'amandes, il vous faut faire 5 kilos de noix brutes déjà. Donc si vous l'acheter à 250 FCFA, ça vous revient en réalité à 1000FCFA. Et après, il y a le coût de la transformation, la main- d’œuvre, l'électricité, les impôts et après vous vous retrouvez avec un produit qui, en définitive vous revient autour de 3000 FCFA. De plus, il faut bien que vous fassiez une marge pour que les gens puissent revendre. Quand on aura éliminé beaucoup de main- d'œuvre et que les machines vont faire des économies d'échelle, peut-être que ce qui se vend aujourd'hui à 4000 FCFA va se retrouver à 3000 CFA.
C'est tout de même aberrant de la faire partir à l'étranger et que ce soit l'étranger qui nous la ramène en produit fini pour nous l'imposer à des prix élevés dans nos supermarchés…Nous ne sommes pas obligés de l'envoyer là-bas. C'est simplement parce qu’il n’existe pas encore de marché local. Combien d'ivoirien consomment des arachides à plus forte raison des noix de cajou ?
Les arachides ou cacahuètes, ça, on en trouve tout de même à tous les coins de rues…Oui mais ils sont combien à en acheter en apéritif? En Europe pour avoir été souvent dans les supermarchés là-bas, les européens ne connaissent pas les fruits de saison, ils veulent pouvoir manger tout ce qu'ils veulent à n'importe quelle saison. Donc, ils n’hésitent pas à acheter tout ça en y mettant le prix. Nous, ici, c'est pas très cher parce qu'ici le kilo d'amande va se vendre autour de 4000 voire 5000 FCFA. En Europe, le kilo d'amandes grillées, c'est autour de 40 euros. C’est-à-dire 26.000 FCFA.
Mais ils sont vus comme des produits exotiques et ont donc tendance à coûter plus cher que les autres produits…Vous comprenez pourquoi nous préférons vendre en Europe ? Si nous pouvons faire plus de marge là-bas, pourquoi, me prendre la tête à chercher à satisfaire un marché local qui n’existe pas encore véritablement? En vendant par container, nous n'avons pas de frais de distribution, pas de commerciaux à rémunérer. On sait d’avance que les gens en ont besoin là-bas.
Quand vous dites que vous vous sentez bien, vous voulez parler spécifiquement de votre cas?On ne veut pas augmenter nos problèmes même si c'est un milieu extrêmement pourvoyeur d'emploi. L'Etat depuis l'année dernière a essayé de voir comment booster la transformation, mais pour cela, il va falloir accélérer les choses, si on ne veut pas que demain, ce ne soit que les grands groupes internationaux qui aient le monopole. Car dans mon réseau, nous avons près d'une dizaine d'usines en création en Côte d'Ivoire, dans lequel nous n’avons que des ivoiriens. Mais, il y a de grands groupes étrangers dont des indiens et autres qui arrivent.
Après, il faut savoir qu'avec une usine comme la nôtre par exemple, nous faisons 1500 -2000 tonnes par an, nous employons près de 200 personnes par an à côté de ça, les grands groupes, ce sont 2000 à 3000 personnes qu'ils emploient. Donc c'est quand même important si l'Etat arrivait à faire en sorte que les gens passent à la transformation. Mais, on ne le fera pas pour le moment parce qu’à l’heure actuelle, ça ne serait pas rentable.
Pour quelles raisons ?Car il faut étudier tous les coûts. On a essayé de fixer des prix qui arrangent plus ou moins les paysans mais il faut qu'on leur impose également des normes de qualité. De plus, l'Etat doit faire en sorte que nous nationaux, ayons un accès prioritaire, ce n’est pas méchant de le dire ou même de le penser, même s’il est vrai que nous sommes dans un pays de droit, il faudrait qu'on dise par exemple que les usines installées en Côte d'Ivoire, sont prioritaires. C’est-à-dire, ce n’est qu’à eux seulement qu'on doit vendre en premier pour que nous puissions nous approvisionner ensuite, viendront les étrangers.
Il faut aussi que les gens pensent à mettre une partie du dus qui est aujourd'hui collecté par l'exportation pour créer un fonds de garantie parce que nous n’aimons pas trop cette notion de banque, parce qu'après on ne sait pas qui donne quoi à qui. Pour le secteur de la transformation, même si on prend 1F et demi ou 2 FCFA sur les données actuellement, une fois que ce fonds est mis en place, un fonds auquel participera également l'Etat, tous les ivoiriens qui auront de bons projets bancables, si une banque dit « ok on accepte de vous financer », que ce fonds dise également « ok, nous partageons le risque avec vous».
Que faut-il faire alors ?Aujourd’hui, les banques ne vous prêteront de l’argent que si vous donnez la garantie en phase de remboursement. Une banque qui vous dira « ok, je veux financer votre projet à 80% ». Cela voudra dire, que nous, nous prenons les 60% de la garantie et le promoteur va trouver 10 ou 20%. Nous pensons que si ce fonds est exclusivement réservé aux ivoiriens, cela n'aura rien de chauvin parce que c'est notre argent. Avec ça, les gens pourront arriver à faire quelque chose parce qu'une usine de noix de cajou transformé ça coûte très cher. Une usine en moyenne, c’est autour de 3000 tonnes que ça commence à être une grande usine, il faut déjà mettre environ 1 milliard- 1 milliard 5 sur la table rien qu'en équipements, construction etc. Mais le plus dur reste à venir contrairement à ce que les gens pensent. Si vous mettez une usine de 3000 tonnes en place autour de 1 milliard, 1 milliard 5, la campagne étant saisonnière ça veut dire qu'il vous faut acheter un stock, parce que vous n'allez pas faire une usine qui ne va tourner que sur 3 ou 4 mois donc, il vous faut acheter 3000 tonnes de noix cajou.
Le calcul est très simple, vous faites 250 x 1000, ça vous fait 250 millions, donc 3000 ça vous fait de 750 à 800 millions de FCFA qu'il faut mobiliser voire un milliard. Donc vous voyez que c'est très difficile de faire tourner. Car si vous mettez 1 milliard pour construire chaque année, il vous faudra au bas mot 1milliard ou 1,2 milliards de fonds de roulement pour pouvoir tenir la campagne.
C’est énorme…Certes ce sont des sommes énormes mais il est temps, que tous, nous regardions dans la même direction, si l'Etat veut que d'ici 2016, 2017, nous soyons à 50 voire à 60% de transformation, ça passe inévitablement par ce genre de décisiions. Nous croyons que le nouveau code d'investissement est assez attractif surtout pour les régions du nord, avec la génération qu'il y a mais derrière il faut qu'on puisse aller plus loin notamment dans la recherche des terrains et la mise à disposition des terrains, d’espaces viabilisés parce que c'est un réel problème au nord. Les voies d'accès, le problème d'électrification pour les usines, tout ça complique encore un peu plus les choses. Nous, on en a fait un peu les frais à Bondoukou. Et, tous ces paramètres techniques sont du ressort de l'Etat non des individus que nous sommes.
La filière de l'acajou, une filière d'avenir ou en pointillés?Non, une filière nettement d'avenir. Parce que si on arrive aujourd'hui à transformer ne serait-ce que la moitié en Côte d'Ivoire soit 250 voire 3000 tonnes de noix de cajou, c'est autour de 300 000 tonnes à peu près de noix de cajou. Ne serait-ce qu'avec à ça ; nous allons créer 1 à 2 millions d'emploi pour les jeunes. Ce qui va résorber les problèmes de l'exode rural des jeunes du nord vers le sud, occasionner des entrées de devises, créer des infrastructures, des routes des écoles, des centres de santé et tout cela contribuera au développement de ces régions et apportera des devises à l'Etat. Nous pensons que c'est un bon challenge que l'Etat s'est fixé. Cependant, la date de 2016 nous paraît trop juste. Jusqu'en 2020, nous paraît plus raisonnable pour 50 voire 60% de transformation de notre production nationale.
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