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mardi 30 septembre 2014

Guillaume Soro, la grosse victime de l’appel de Bedié

Si on s’en tient au contenu de l’historique deuxième appel du Président du PDCI, Henri Konan Bédié, à faire d’Alassane Ouattara l’unique candidat du RHDP pour l’élection présidentielle de 2015, on en déduit qu’un deal, visible comme le nez au milieu du visage, a été goupillé entre les deux hommes forts de la Côte d’Ivoire à l’heure actuelle. Le chef de l’Etat et le faiseur de roi, Henri Konan Bédié.
 Comme « L’Eléphant » l’a conté depuis longtemps, le président du PDCI a négocié ferme les conditions de son « oui » à la candidature unique.
 
Il avait voulu d’abord une modification de la Constitution pour la création d’un poste de vice-président qui, évidemment, devrait lui revenir pour ses vieux jours. Mais l’idée, au RDR, n’a emballé personne, surtout Soro Guillaume, le dauphin constitutionnel qui voyait dans ce projet, un obstacle à son ascension au dernier étage du pouvoir d’Etat. Et, dans les coulisses, a bataillé ferme pour l’abandon pure et simple de ce dangereux projet.
 
Ensuite, Bédié a voulu le maintien de Youssouf Bakayoko à la tête de la Cei, malgré le fait que ce poste devait revenir logiquement, selon les têtes à penser du RDR, au représentant, dans cette institution, du chef de l’Etat. Mais le chef de l’Etat a accédé à cette exigence. Et la suite est connue de tous. A Daoukro, le Président de la République a défendu la désignation de Youssouf Bakayoko avec un zèle qui a surpris tout le monde. Allant jusqu’à menacer de faire organiser les élections par le ministère de l’Intérieur, si l’on ne laissait pas Youssouf Bakayoko dormir en paix.
 
 
http://laregionale.com/2-societe/2014/09/27/3922/Soro-Guillaume-terriblement-affecte
Autre exigence, le Président du PDCI, a posé la nomination de Niamien N’Goran, actuel Inspecteur Général d’Etat, au poste de Premier Ministre, en remplacement de Daniel Kablan Duncan. Motif ? L’électorat du PDCI-RDA étant majoritairement Baoulé, lequel ne cesse de se plaindre, de crier que les Baoulé n’ont pas obtenu grand’chose après leur vote massif de 2010, n’accepterait pas un autre appel à voter Ouattara s’il n’avait pas l’illusion que le PDCI tient de fortes institutions de l’Etat avec à leur tête, des Baoulé.
 
Il faut donc, a expliqué Bédié à Ouattara, qu’il puisse présenter quelque chose de consistant aux militants du PDCI, en leur montrant « un canari » bien garni, c’est-à-dire, pouvoir leur présenter un fils Baoulé bien propulsé au sommet de l’Etat afin d’utiliser cela comme un argument massue pour les convaincre d’accepter la candidature unique de Ouattara.
 
Mais l’idée de la nomination de Niamien N’Goran n’a pas beaucoup enchanté notre Président, trop proche de Daniel Kablan Duncan, avec qui il partage une convergence de vue presque parfaite sur tous les sujets. Sauf que la politique étant la saine appréciation des réalités du terrain et du moment, le chef de l’Etat n’a pas eu d’autres choix. On devrait donc, dans les semaines ou mois à venir, voir débarquer Niamien N’Goran à la Primature et ce, jusqu’en 2020 ? Mais au Palais, déjà, dans cette perspective, on a déjà pris des mesures. Duncan n’ayant aucune ambition présidentielle contrairement à Niamien N’Goran, la nomination récente de Thierry Tanoh et de Serrey Eifel (malgré la haine cordiale entre ce dernier et Amadou Gon), aux postes de Secrétaires généraux adjoints de la Présidence avec rang de ministre, devrait permettre de surveiller les mouvements financiers à la Primature et d’encadrer Niamien N’Goran afin qu’il ne devienne pas incontrôlable. 
 
La dernière exigence qui « tue »
 
Bédié a certes juré pendant le 12ème Congrès de son parti qu’il est impossible que le PDCI, en tant que parti politique, n’ait pas de candidat à l’élection présidentielle, mais dans les faits, comme le disent des mauvaises langues, tant que Bédié sera vivant, il n’acceptera pas qu’il y ait au PDCI, quelqu’un qui soit au-dessus de lui, comme par exemple, un chef de l’Etat issu des rangs du PDCI-RDA. Puisque chacun sait qu’en l’état actuel de la configuration politique de la Côte d’Ivoire, avec un FPI à la rue avec des millions d’électeurs qui ne jurent que par la perte du RDR et de son champion, un candidat du PDCI pourrait facilement battre le chef de l’Etat si les militants du FPI, pour se venger d’Alassane Ouattara, décidaient de le voter massivement. Et Bédié se serait, de son vivant, ainsi, retrouvé dans l’ombre de ce nouveau Président, l’un de ses « suiveurs ». Inacceptable.
 
Il a donc, pour donner l’impression aux militants du PDCI qu’il œuvre pour le retour du PDCI au pouvoir, sortie l’idée de la création du PDCI-RDR dans une logique d’alternance du pouvoir.
 
Le PDCI, par sa seule volonté, accepte de laisser Ouattara continuer jusqu’en 2020 et, en contrepartie, le RDR, dans le cadre de cette nouvelle alliance-fusion, accepte de laisser un cadre du PDCI gouverner après 2020. Évidemment, une telle proposition, dans la mesure où la Constitution n’autorise que deux mandats, ne posait aucun problème au chef de l’Etat qui, de bon cœur, l’a accepté. Au RDR également, les têtes d’huile n’y voient, pour le moment, aucun inconvénient. Ce qui compte, c’est de garder, pour cinq ans encore, le pouvoir d’Etat. Après, « on verra… »
 
Dans l’entendement du Président Bédié, le futur Président du PDCI-RDA après lui, ce n’est personne d’autre que Niamien N’goran. Les pouvoirs qu’il avait voulu lui confier dans la réforme du PDCI en vue du toilettage des textes dans la perspective du Congrès et qui ont fait hurler plusieurs barons il n’y a pas longtemps, obéissaient à ce plan. Or, placer Niamien N’Goran à la Primature jusqu’en 2020, dans la perspective de l’alternance, le calcul est limpide. C’est le futur président du PDCI et le futur candidat à l’élection présidentielle. Il n’est pas malin notre Bédié national ?
 
Mais tous ces calculs de Bédié n’enchantent pas un homme : Soro Kigbafori Guillaume. Le désormais très discret Président de l’Assemblée nationale. Il n’est pas du PDCI, mais tout ça lui cause un tort insoupçonné.
 
Il était à Daoukro pendant le séjour du Président de la République. C’est devant lui que Bédié a déroulé le contenu de son appel à faire de Ouattara le candidat unique du RHDP et a parlé d’alternance au sommet de l’Etat dans le cadre du PDCI-RDR. Il a eu l’occasion d’échanger avec le président Bédié, de le saluer, même en quelques minutes.
Mais ne voilà-t-il pas que le même Soro Guillaume, après la tournée, vient, de nouveau, de déposer sa valise à Daoukro dans le cadre d’une visite à Bédié ?
 
« (…) Je profite pour le féliciter et lui dire toute mon admiration pour son appel, son soutien à la candidature unique du Président Alassane Ouattara au sein du RHDP et au-delà, l'appel à l'unité nationale et au parti unifié PDCI-RDR pour l'alternance. Je salue la grandeur et la Sagesse de ces deux Grands Hommes d'Etat qui donnent une grande leçon de choses aux jeunes générations. L'Unité Nationale doit être au-dessus de tout. Aucun orgueil, aucune ambition ne doit primer sur l'intérêt général. En attendant, je me permettrai d'humer les effluves des terres champêtres de Daoukro aux côtés du doyen Bédié ». A déclaré Soro Guillaume.
 
Sauf que derrière ces belles paroles, se cache en ce moment de lancinantes inquiétudes. La « jeune génération » actuelle dont il fait partie, si le plan de Bédié devrait fonctionner, n’arrivera au pouvoir, au plus tôt, qu’en 2030. C’est-à-dire dans 16 ans. Et Dieu seul sait ce qui peut se passer dans ce pays d’ici à 2030. Pour Soro Guillaume.
 
Or chacun sait que Soro Guillaume, dans tous ses rêves, se voit le futur Président de la Côte d’Ivoire après Alassane Ouattara. A quel niveau de responsabilité étatique sera-t-il d’ici à 2030 au point de pouvoir devenir Président de la République par le jeu de l’alternance s’il arrivait à s’imposer au RDR où la bataille pour la succession de Ouattara s’annonce « mortelle » ?
 
Bref, l’appel de Bédié a bouleversé tous les calculs de Soro Guillaume et mis en danger son projet de succéder le plus rapidement possible à Alassane Ouattara au sommet de l’Etat.
 
Comme il aime à le dire lui-même, « à chaque jour suffit sa peine». On espère que les bonnes odeurs des terres fertiles de Daoukro lui permettront d’accepter la perspective de son installation dans le fauteuil présidentiel, si « Dieu le veut », en 2030. Mais à cette échéance, il lui faudra affronter des leaders sortis d’une nouvelle génération à laquelle il n’appartient pas. Et qui, « effluves des terres champêtres » ou pas de « Daoukro », ne lui feront aucun cadeau…sur son passé de chef rebelle qu’il dit assumer heureusement, avec courage et honneur…
 
Le titre est de la rédaction
 
L’Eléphant déchaîné
 

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