Pourtant, l’horreur,
l’enfer a désormais un nom : l’état du Borno au nord du Nigeria. Et le
diable et sa cour s’appellent Boko Haram.
Vous souvenez-vous de ces « selfies »
que vous faisiez circuler sur les réseaux sociaux en affichant le
hashtag «#BringBackOurgirls? Si si, rappelez-vous, même Michelle Obama y
était allée de sa protestation muette en tenant une affiche similaire
entre ses mains. C’était en avril dernier. La cruauté que fait régner le
groupe Boko Haram à toute la partie nord du Nigeria depuis 5 ans
semblait finalement vous interpeler à travers l’injuste et inhumain kidnapping de plusieurs centaines de jeunes filles à Chibok pour les transformer en esclaves des combattants islamistes. Le monde entier,
longtemps indifférent aux carnages réguliers de ce groupe de fanatiques,
avait enfin trouvé une cause de ralliement et promettait de l’action.
Le Canada, les Etats-Unis, l’Europe, tous les pays ont promis une
implication plus active dans la lutte contre les barbares.
Puis, comme trop souvent hélas,
l’émotion a fait long feu. Peu à peu, vous vous êtes tous détournés.
Vous n’avez plus écouté que d’une oreille distraite la comptabilité
macabre des journalistes recensant jour après jours les nouvelles
abjections des islamistes nigérians. L’ampleur des massacres a fini par
les rendre irréels à votre entendement. Des villages entiers ont été
rasés. Cette fin de semaine, c’était un autre double attentat dans un
marché. Les auteurs, ah tiens un raffinement de l’horreur, deux jeunes
filles de 19 et 15 ans transformées en bombes humaines. Quelques jours
avant, c’était la ville de Baga et quinze villages environnants qui ont
été tout simplement effacés. Plus de 2.000 morts. Des cadavres sur 5
kilomètres de route selon des témoins.
Mais pas d’images. Pas de témoignages.
Pas de « Je suis Baga ». Certains disent : « on ne peut pas s’indigner
constamment, contre tout, il faut savoir prioriser les choix de combats
».
Et c’est cela sans doute la grande
faillite de notre époque : ce faux argument de prétendre que nous
n’avons plus les moyens de nous engager sur plusieurs fronts à la fois. À
défaut d’un engagement combattant, ne fut-ce qu’un engagement du cœur,
de l’émotion, du refus de laisser le silence achever les victimes de ces
barbaries. Car comme disait Martin Luther King, à la fin ce n’est pas
tant de la calomnie des ennemis qu’on se souviendra mais plutôt du
silence des amis. Notre silence sur le Nigeria qui rend encore plus
immonde, plus audible le rire grinçant et diabolique du chef du groupe
Boko Haram, Abubakar Shekau, chaque fois qu’il apparait sur vidéo. Notre
silence et nos bras croisés qui enhardissent les djihadistes en leur
faisant comprendre qu’il suffit de prendre l’assaut sur la planète à
partir de plusieurs fronts différents pour nous tétaniser et nous
déborder.
Le titre est de la rédaction
journaldemontreal
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