Combien de morts faudra-t-il encore afin qu'en Côte d'Ivoire, les
décisions soient appliquées, de gré ou de force, avec la dernière
énergie, surtout en ce qui concerne l’immobilier? Des millions,
peut-être. Car tout porte à croire que nous attendons d’atteindre le
seuil de l’intolérable pour comprendre qu’il urge de quitter le champ du
verbe pour celui de l’action salvatrice. Combien de temps mettra-t-on
encore pour déployer des actions véritables, afin de faire l’économie de
ces morts ? Cela mettra du temps, assurément. Parce qu’à chaque année,
pendant la saison des pluies qui ne donne jamais le beau temps chez
nous, revient comme un refrain ce discours : « Les constructions
anarchiques seront rasées ». Plus on le dit, plus elles poussent comme
des herbes sauvages que personne n’entend tondre ou faire disparaître
autoritairement. Ce discours-refrain qui revient chaque année, en saison
des pluies en plus, donne l’illusion désormais que tout sera mis en
œuvre pour qu’elles soient détruites. Elles ne le seront pas.
D’ailleurs, elles pousseront de partout dans ce pays où l’on construit
sans grand effort d’urbanisation. Tu as de l’argent, tu te bâtis ce que
tu veux. Si tu n'en as pas aussi, tu fais ton toit où tu veux et peux.
Résultat ?
Cette année encore, la pluie a endeuillé des familles
pauvres. Et inondé des demeures bien faites dans des quartiers nouveaux
ou anciens, où l’impératif de bâtir vite, sans aménagement conséquent de
l’espace, a pris le dessus. Pourquoi, dès lors, s’en étonner, quand
tout se passe comme si l’on assistait au tout permis ? Le décor à voir :
constructions anarchiques qui dénaturent laidement les quartiers ;
non-respect des normes de construction (on construit n’importe où) ;
bassins et caniveaux occupés et bouchés, avec, au bout de ce désordre
urbanistique, le tout béton d’un côté et le tout taudis se côtoyant dans
des espaces où le danger est évident, de l'autre.
Aujourd’hui,
personne ne voit que du côté de Danga, à Cocody, au carrefour menant au
Lycée technique d’Abidjan, des bas-fonds, sortent de terre des
immeubles. Une prouesse architecturale certes, mais qui a l’inconvénient
de boucher les voies d’écoulement des eaux. En cas de saison des
pluies, doit-on s’étonner que l’eau déborde et crée des désagréments ?
Même pas !
Combien de temps faudra-t-il encore pour que l’on sorte de
ce règne de l’anarchie ? Simple question. Qui repose celle de
l’urbanisation sauvage dans nos cités saturées par le boom démographique
et surtout le désordre. Ce désordre est à l’image de la naguère belle
cité d’Adjamé, les 220 logements qui sont devenus les 220 soucis des
habitants. Maquis, bruits de tous ordres, saletés de toutes les odeurs,
commerces de tous les types sur les voies (trottoirs, rues, ruelles,
parkings), espaces verts, etc. sont le décor nouveau. Cocody-la coquette
d’hier suit. Koumassi a déjà le label. Treichville se bat
courageusement contre cette manière de mal-vivre, même avec ses
caniveaux bouchés. La route de l’émergence sera longue avec ces
mentalités consorts.
La Régionale / Michel KOFFI
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