Après avoir commis la grave
et irréparable erreur politique de transférer à La Haye le Président
Laurent GBAGBO, en fin novembre 2011, puis le ministre Charles BLE
GOUDE, en mars 2014, suite à la crise postélectorale de 2010-2011, le
régime d'Abidjan que dirige M. Alassane D. OUATTARA a décidé (enfin) de
traduire la Première Dame Simone Ehivet GBAGBO et quatre-vingt-deux (82)
hauts responsables de l'ex-régime de la LMP (la majorité
présidentielle) devant une Cour d'assises de la justice ivoirienne.
Ce
procès vient de s'ouvrir le vendredi 26 décembre 2014. Cependant,
contrairement à la Cour pénale internationale (CPI), qui poursuit pour
des crimes contre l'humanité ou des violations graves des Droits de
l'homme, la justice de M. OUATTARA a choisi de poursuivre ces
"pro-Gbagbo", collectivement, sous le principal chef d'accusation
d'atteintes à la sûreté de l'Etat.2/ LES OBSERVATIONS DE LA FIDHOP :
La Fondation Ivoirienne pour
l’observation et la surveillance des Droits de l'Homme et de la vie
Politique (FIDHOP) fait des observations relatives, d'une part, aux
motivations et aux motifs de ce procès et, d'autre part, tenant à la
nature réelle, politique, de ces assises.
2.1. S'agissant des motivations et des motifs:
En tenant compte des reports répétés de
ce procès, des hésitations et balbutiements, mais surtout au vu de la
constitution vraisemblablement partisane du jury, maintes fois décriée
par la société civile, l'on s'aperçoit que le régime d'Abidjan s'est vu
obligé de tenir ce procès, non pas dans un souci de recherche de la
vérité, encore moins pour le bien du peuple ivoirien; mais plutôt pour
démontrer sa crédibilité perdue devant ses partenaires et soutiens de la
communauté internationale. Car, tout observateur objectif de
l'évolution de la situation sociopolitique ivoirienne peut aisément se
rendre compte que les confiscations des libertés fondamentales et des
libertés publiques, l'instrumentalisation de la justice, l'impunité et
les corruptions dans lesquelles sont impliquées de hauts responsables de
ce régime ivoirien, ont fini par décevoir et désillusionner d'anciens
amis et soutiens de M. OUATTARA, tant dans le pays que dans le monde. Ce
procès ressemble donc à une vaine tentative de restaurer l'Etat de
droit en Côte d'Ivoire, en tentant de changer l'image écornée de la
justice ivoirienne, qualifiée désormais de justice des vainqueurs.
Aussi, si le ministre de la justice du gouvernement Duncan a tenu à
préciser que Mme GBAGBO n'est pas poursuivie pour les mêmes chefs
d'accusation que ceux de la CPI, est-ce d'abord parce qu'il est lui-même
conscient de ce que les crimes contre l'humanité et les violations
graves des Droits de l'homme ont effectivement été commis par les deux
camps durant la période électorale, et sans doute de la manière la plus
évidente par les éléments de leur propre camp, et que leurs nombreuses
victimes, notamment celles de l'ouest du pays attendent toujours que
justice soit rendue. Mais surtout, en se limitant au chef d'accusation
farfelu d'atteintes à la sûreté de l'Etat, les autorités actuelles de la
Côte d'Ivoire laissent comprendre, aux Ivoiriens et particulièrement à
la communauté internationale et à la CPI, que Mme Simone GBAGBO est
toujours susceptible d'être transférée à La Haye. Sauf si elle et son
parti, le Front populaire ivoirien (FPI) acceptent de collaborer avec ce
régime ou de se soumettre à lui, comme sont prêts à le faire certains
dirigeants du FPI. C'est un chantage subtil et honteux que dénonce la
FIDHOP!
2.2. S'agissant de la nature politique de ce procès :
Pour la FIDHOP, il paraît évident que ce
procès en assises est plutôt politique que juridique. Pourquoi? Parce
que la question essentielle de ce procès sera de savoir si, oui ou non,
le pouvoir du Président Laurent GBAGBO après la présidentielle de 2010,
et donc du gouvernement dirigé par le Prof. AKE N'GBO auquel ont
appartenu la plupart des personnalités à la barre, était légitime et
légal. Dans cette problématique, M. OUATTARA, par les voix de son
procureur et des avocats de son régime, s'évertuera, vainement, à
démontrer que les dignitaires LMP auraient tous été dans l'illégalité,
qu'ils auront été des usurpateurs, des faussaires ou des faux
démocrates, qui auraient perdu l'élection présidentielle dernière et qui
se seraient accrochés au pouvoir, en formant un gouvernement fictif et
illégal...; telle serait la source principale des trois milles morts
dénombrés par l'actuel Chef de l'Etat à l'issue des affrontements
engendrés par cet entêtement. Et pourtant, le candidat Laurent GBAGBO ne
s'est pas auto-proclamé vainqueur du scrutin du 28 novembre 2010 ; il a
bien été déclaré tel par le Conseil Constitutionnel, devant lequel il a
prêté serment le 04 décembre 2010. Ce qui confère à son pouvoir son
caractère légal. En plus, M. GBAGBO jouit, toujours, d'une légitimité
qu'il a acquise, d'une part, au premier tour de l'élection, où il est
sorti vainqueur devant les treize (13) autres candidats, et d'autre
part, parce que le camp de M. OUATTARA s'est rendu coupable de fraudes
et tricheries avérées. Ce qu'ont reconnu et validé les membres du
Conseil Constitutionnel. Ainsi, nier au Président Laurent GBAGBO sa
victoire à l'élection présidentielle de 2010 et nier la légalité ou la
légitimité de son pouvoir, c'est remettre en cause le Conseil
Constitutionnel. Or, c'est à ce même Conseil Constitutionnel présidé par
le Prof. Paul YAO N'DRE que M. Alassane OUATTARA et ses amis de la
communauté internationale ont eu recours pour légaliser leur coup de
force du 11 avril 2011. Et c'est devant cette même instance que l'actuel
Chef de l'Etat prêta serment le 6 mai 2011, dans la même salle du
palais présidentiel. Si ce Conseil Constitutionnel n'a procuré, ni
légalité ni légitimité au pouvoir du Président GBAGBO après l'élection
présidentielle de 2010, par quelle alchimie en confèrerait-il au régime
du Chef de l'Etat Alassane Dramne OUATTARA? Et c'est là tout le ridicule
qui caractérise ce procès en assises, ainsi que ses commanditaires!
3/ LES RECOMMANDATIONS DE LA FIDHOP :
La FIDHOP dénonce un procès politique
et à deux vitesses. La FIDHOP dénonce le chantage honteux du régime
Ouattara à l'endroit de ses principaux opposants politiques du FPI. La
FIDHOP exige en conséquence la libération pure et simple, et sans
condition aucune, de Mme Simone EHIVET GBAGBO et des 82 hauts
responsables du régime déchu. La FIDHOP demande au régime d'Abidjan,
s'il souhaite vraiment juger les criminels qui ont endeuillé la Côte
d'Ivoire et rendre justice aux Ivoiriens, soit d'ouvrir un vrai procès
équitable en Côte d'Ivoire élargi aux rebelles "pro-Ouattara", soit de
transférer ces derniers devant la Cour pénale internationale. En tout
étant de cause, La FIDHOP fait remarquer que dans le contexte actuel, la
justice classique nationale ne parviendra pas à satisfaire toute la
société ivoirienne et qu'elle compromettra au contraire la
réconciliation nationale. D'où la nécessité et l'importance d'une
justice transitionnelle efficace. Malheureusement, le régime de M.
OUATTARA, avec sa Commission, Dialogue, Vérité et Réconciliation, s'est
montré incapable de réconcilier les Ivoiriens. Helas!
Fait à Parme, le 27 décembre 2014
Dr BOGA SAKO GERVAIS
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