Traduire / Translate

lundi 3 novembre 2014

Le Burkina Faso ne sait plus à quel président se vouer

 
Dimanche 2 novembre, l'armée prend possession de la radio-télévision du Burkina, où l'opposante Saran Sérémé et le général à la retraite Kouamé Lougué voulaient se déclarer aptes à mener la transition. © ISSOUF SANOGO / AFP

Dimanche, deux personnalités ont tenté de se déclarer aptes à prendre les commandes de la transition. Pendant ce temps, Isaac Zida continue de consulter. 
C'est un sauve-qui-peut général, un chaos frénétique, un mouvement de panique qui déferle sur les rues de Ouagadougou. "Faites demi-tour", "Ça chauffe en ville", "Ça tire à la RTB", crient des habitants, juchés sur leur moto-taxi ou tentant de manœuvrer leur voiture pour s'éloigner de la radio-télévision nationale, au centre de la ville. Les vendeurs de rues replient leurs marchandises et, vision improbable, un homme s'enfuit à cheval, au galop. Ce sont des tirs de sommation de l'armée, mais les violences des derniers jours, dont témoignent les bâtiments brûlés et pillés de l'hôtel Azalaï et de l'Assemblée nationale, ont de toute évidence marqué les esprits.

http://laregionale.com/1-politique/2014/11/03/5308/Isaac-Zida-Qui-est-cet-officier-de-l-armee-burkinabe

Dimanche matin, l'opposition avait convoqué une manifestation qui, modeste au départ, n'a fait qu'enfler. La capitale du Burkina Faso a ensuite été le théâtre d'une mauvaise comédie. En quelques minutes, deux personnes ont tenté de s'y proclamer président du pays, en direct depuis la télévision nationale. Le premier est le général retraité Kouamé Lougué, dont la foule avait scandé le nom la semaine dernière sans qu'il réagisse à ce qui ressemblait à un plébiscite. Une fois assis dans le studio et alors qu'il s'apprêtait à annoncer qu'il prenait les rênes du pays, il en a été délogé par des manifestants furieux. Car ceux-là attendaient une autre aspirante à la présidence. Sanan Sérémé, membre de la coalition de l'opposition et dirigeante du Parti pour le développement et le changement (PDC), était, elle aussi, venue annoncer qu'elle offrait ses services à la nation. La confusion générale l'en a empêchée, même si c'était désormais son nom que la foule scandait. C'est alors que l'armée a tiré pour disperser les manifestants.

"Diviser pour mieux régner"

Le Burkina Faso ne sait donc plus à quel président se vouer. Vendredi, le général Nabéré Honoré Traoré, ancien chef d'état-major, avait dit prendre les rênes de la transition, mais le même jour, le lieutenant-colonel Isaac Yacouba Zida, 49 ans, déclarait que les propos de Traoré étaient "caducs". "J'assume les responsabilités de chef de la transition et de chef de l'État", avait-il ajouté. Samedi, l'armée l'adoubait, dans un communiqué signé par Traoré lui-même. Mais la plupart des partis d'opposition refusent de soutenir cet ancien commandant en second du régiment de la sécurité présidentielle de Blaise Compaoré, le président déchu. Il leur faudra cependant se mettre d'accord : le Burkina Faso compte 32 partis d'opposition, et Zida en a rencontré 25 dimanche soir. "C'est une des plaies de notre démocratie, soupirait Norbert Michel Tiendrebeogo, venu représenter le Front des forces spéciales. Cela a peut-être été suscité par le chef de l'État qui est parti, c'est diviser pour mieux régner."

http://laregionale.com/1-politique/2014/11/03/5305/Blaise-Compaore-Un-colis-encombrant-en-exil-dore-a-Yamoussoukro

La coordination ne semble, en effet, pas être le fort d'une opposition morcelée : "Personne ne savait que Saran avait l'intention de se proclamer présidente, témoigne Philippe Ouédraogo, ancien ministre de l'Équipement sous Thomas Sankara et député. Pourtant, nous nous connaissons bien, les partis d'opposition se rencontrent chaque semaine depuis mai 2013." Ce lundi matin, Zida doit rencontrer des diplomates étrangers, puis se rendre à une nouvelle réunion avec les partis d'opposition. Mais dimanche soir, il a réaffirmé sa volonté de mener le régime de transition. L'armée semble bien avoir confisqué le soulèvement d'un peuple, qui n'a pas l'air de vouloir le lui laisser...

 lepoint.fr


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire